Adopter après le chagrin

Une idée coupable

D’abord il y a ce vertige. Cette étrange présence du vide.

Le silence dans la maison, les gamelles inutiles, la couverture que l’on replie doucement et que l’on sert, dans l’espoir de capter une dernière odeur pour conjurer l’absence..

Perdre un animal, c’est perdre ce prolongement de soi qui nous rattachait à l’instant présent. C’est voir s’évanouir une approche du monde, par des yeux qui n’étaient pas les nôtres, mais qui apposaient un filtre de joie sur notre quotidien.

Le deuil s’installe… et parfois une idée, fragile encore, nous traverse. Une idée teintée de culpabilité: et si j’adoptais à nouveau ?

Je l’entends souvent, cette question, dans la voix hésitante des personnes que j’accompagne après l’euthanasie de leur compagnon.  Elle vient timidement, comme une trahison. Comme si aimer de nouveau, c’était trahir celui ou celle que l’on a perdu.

Mais c’est tout l’inverse.

Aimer un autre animal, ce n’est pas remplacer l’ancien. C’est recommencer. Et recommencer, ce n’est jamais refaire à l’identique. C’est construire autre chose. Un lien nouveau. Une histoire inédite. Avec ses surprises, ses maladresses et ses tendresses nouvelles. 

Mais avant de se lancer, il convient de s’accorder le temps de la réflexion, de s’interroger, de s’écouter.

Voici quelques pistes à explorer avant d’ouvrir à nouveau votre porte et votre cœur …

Suis-je prêt(e) ?

Il n’y a pas de délai idéal. Certains ressentent le besoin d’adopter très vite, pour ne pas sombrer. D’autres ont besoin de mois, d’années. Il n’y a pas de règle, mais une seule question essentielle : est-ce que je le fais pour l’animal à venir… ou pour faire taire mon manque ?

Est-ce que j'attends une ressemblance ?

Il est naturel de chercher inconsciemment une « copie ». De reprendre la même race, la même couleur, le même prénom parfois. Mais chaque animal est unique, et accueillir un nouveau compagnon, c’est accepter qu’il soit différent. Avec sa personnalité, ses besoins, son rythme. 

Suis-je disponible émotionnellement ?

Un animal, surtout s’il est jeune ou issu d’un sauvetage, demandera de la patience, de la présence, une attention constante. Est-ce que j’ai l’espace intérieur pour cela aujourd’hui ? Est-ce que je peux offrir un foyer sécurisant ?

Et les autres membres de mon foyer ?

Nous ne sommes pas toujours seul à décider. Les enfants, le conjoint, un autre animal… tous vivent le deuil à leur manière. Parler ensemble du moment où un nouvel animal viendra agrandir la famille peut aider à éviter des incompréhensions ou des tensions ..

Conclusion

Aimer à nouveau, c’est un acte de confiance envers la vie. Ce n’est pas oublier. C’est accepter que le cœur, malgré ses cicatrices, reste vivant. Capable de battre encore. Autrement.

Et pour ceux qui ne se sentent pas capables de réitérer l’aventure ou qui ont fait le deuil pour des raisons justes de faire famille avec un nouvel animal (grand âge, indisponibilité), nous le comprenons et nous leur envoyons nos douces pensées dans ce chemin qu’est celui du deuil animalier.